Nouvelle CCT n°161 : droit du travailleur à demander des conditions de travail plus prévisibles/plus sûres !


Les partenaires sociaux, réunis au sein du Conseil National du Travail (CNT) sont parvenus à mettre en œuvre, au niveau belge, la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne.
La convention collective de travail (CCT) n°161 du 27 septembre 2022 consacre en effet le droit, pour un travailleur, de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, tout en veillant à mettre en place des garanties pour l’exercice de ce droit pour les parties au contrat de travail.
Cette convention, entrée en vigueur le 1er octobre 2022, est conclue pour une durée indéterminée. Nous vous en présentons ci-après les principaux aspects.
 
Champ d’application

À certaines conditions, les travailleurs engagés dans les liens d'un contrat de travail peuvent demander à leur employeur une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres.
Cette possibilité n’est cependant pas offerte aux travailleurs ayant une relation de travail dans laquelle leur temps de travail prédéterminé et réel est inférieur ou égal à une moyenne de 3 heures par semaine au cours d’une période de référence de quatre semaines consécutives.
 
Condition d’ancienneté de 6 mois

Pour bénéficier du droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, le travailleur doit avoir une ancienneté d’au moins 6 mois auprès du même employeur.
Pour la détermination de l’ancienneté, les principes suivants sont appliqués :

  • les périodes d’occupation auprès du même employeur sont additionnées ;
  • en cas de contrats de travail à durée déterminée successifs auprès du même employeur, les périodes entre ces contrats sont neutralisées.  En d’autres termes, ces périodes d’interruption ne font pas perdre l’ancienneté déjà acquise. En revanche, ces périodes ne génèrent pas elles-mêmes de l’ancienneté ;
  • en cas de travail intérimaire, c’est uniquement l’ancienneté au sein de l’entreprise de travail intérimaire et chez le même utilisateur qui est prise en considération ;
  • lorsqu’un intérimaire est engagé par un utilisateur après la période d’occupation en tant qu’intérimaire auprès de ce même utilisateur, il convient de prendre en compte toutes les périodes d’activité que le travailleur intérimaire a prestées auprès de cet utilisateur.

 
Qu’entend-on par conditions de travail « plus prévisibles et plus sûres » ?

Peuvent par exemple être considérées comme des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres :

  • un contrat de travail à durée indéterminée plutôt qu’un contrat de travail à durée déterminée ;
  • un contrat de travail à temps plein plutôt qu’un contrat de travail à temps partiel ;
  • un contrat de travail à temps partiel prévoyant un plus grand nombre d’heures plutôt qu’un contrat de travail à temps partiel prévoyant un moins grand nombre d’heures ;
  • un contrat de travail avec un horaire fixe plutôt qu’un contrat de travail avec un horaire variable ;
  • un contrat de travail intérimaire hebdomadaire ou mensuel plutôt qu’un contrat de travail intérimaire journalier.

 
A qui adresser la demande ?

Un travailleur ayant au moins six mois d’ancienneté peut demander à son employeur une forme d’emploi comportant, selon lui (appréciation subjective) des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres. Dans le cadre du travail intérimaire, le travailleur intérimaire adresse sa demande à l’entreprise de travail intérimaire.
 
Conditions d’acceptation de la demande ?

Le travailleur doit spécifier de manière précise dans sa demande la forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres qu’il vise. Il n’est donc pas autorisé à faire des demandes aléatoires dans le seul but de bénéficier de la protection contre le licenciement qui y est liée (voir infra).
Le travailleur est éligible à l’obtention d’une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres dans la mesure où une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres est disponible, où il satisfait aux qualifications et compétences requises à cet effet et où il accepte l’horaire proposé et les conditions de rémunération.
Ces conditions peuvent être concrétisées de différentes façons :

  • par la conclusion d’une convention collective de travail au niveau du secteur ou de l’entreprise ;
  • au niveau de l’entreprise, par un accord conclu en concertation entre l’employeur et la délégation syndicale de l’entreprise ou, en l’absence de délégation syndicale, en concertation entre l’employeur et les travailleurs concernés ;
  • ou d’un commun accord entre l’employeur et son travailleur.

Enfin, le travailleur qui souhaite obtenir une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres doit introduire sa demande écrite auprès de l’employeur au moins 3 mois avant le début souhaité de cette forme d’emploi et ce, par lettre recommandée, remise d’un écrit (dont le double est signé par l’employeur au titre d’accusé de réception) ou voie électronique (moyennant un accusé de réception de l’employeur). Un délai plus court peut, le cas échéant, avoir été prévu via les outils/possibilités énoncés ci-dessus.
La demande doit comprendre :

  • la mention expresse de la CCT n° 161 ;
  • l’indication de la forme d’emploi pour laquelle le travailleur souhaite entrer en ligne de compte ;
  • la date de début souhaitée pour cette forme d’emploi.

Attention ! La demande ne peut pas être introduite par le travailleur plus d’une fois par période de 12 mois. Si l’employeur ne répond pas à la demande dans le délai prévu, le travailleur peut réitérer sa demande, la condition des 12 mois n’étant dans ce cas pas d'application.
 
Réponses possibles de l’employeur

L'employeur doit répondre par écrit à la demande dans un délai d’1 mois (délai porté à 2 mois si l’employeur occupe moins de 20 travailleurs) à compter de la date de celle-ci. A défaut, le travailleur peut donc réitérer sa demande.
L’employeur indiquera plus particulièrement dans sa réponse :

  • en cas de refus : les motifs concrets de sa décision, tout tenant compte au maximum des besoins du travailleur. L’employeur ne doit pas motiver à nouveau son refus si une même demande émane du même travailleur, dont la situation est restée inchangée, et si la motivation de sa réponse concernant la situation du travailleur reste adéquate. L'employeur peut dans ce cas renvoyer à la motivation donnée précédemment.
  • en cas de report : les motifs concrets du report (ex. ressources, capacité opérationnelle, fonctionnement de l’entreprise,…).  Le report de l’exercice d’une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres ne peut cependant avoir pour effet de rendre cet exercice impossible ;
  • en cas de contreproposition : une contreproposition motivée (autre forme d’emploi ou autre période d’exercice de celle-ci).

S’il s’agit de la demande d’un intérimaire, l’utilisateur doit faire connaître à l’entreprise de travail intérimaire les motifs de la réponse par cette entreprise.
Si l’employeur accepte la demande du travailleur ou si le travailleur accepte le report ou la contreproposition de l’employeur, les parties s’accordent sur les modalités concrètes de la forme d’emploi comportant des conditions plus prévisibles et plus sûres (durée du travail dans le respect des dispositions légales en la matière, rémunération, etc.).
 
Protection contre le traitement défavorable

L’employeur ne peut adopter aucune mesure défavorable à l’encontre du travailleur qui fait usage du droit de demander une autre forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, sauf pour des motifs qui sont étrangers à l’exercice de ce droit.
Cette protection sortit ses effets à partir de la demande écrite du travailleur et cesse 2 mois après le début de l’exercice par le travailleur de la forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres ou 2 mois après le refus de la demande par l’employeur.
Lorsqu’aucune forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres n’est entamée, la protection prend fin 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.
Cette protection couvre aussi la période du report éventuel.
Si, au cours de la période de protection, l’employeur prend une mesure défavorable fondée sur des motifs dont il ne sait pas prouver qu’ils sont étrangers à l’exercice du droit prévu par la CCT n° 161, il sera redevable au travailleur d’une indemnité égale à minimum 2 mois de rémunération et à maximum 3 mois de rémunération.
Signalons que le non-renouvellement d’un contrat de travail à durée déterminée peut, le cas échéant, être considéré comme une mesure défavorable, la charge de la preuve en incombant ici au travailleur, lequel ne peut avoir évidemment lui-même demandé le non-renouvellement de son contrat à durée déterminée.
 
Protection contre le licenciement
L’employeur ne peut pas licencier le travailleur qui introduit une demande pour une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, sauf pour des motifs étrangers à l’exercice de ce droit.
 
Cette protection sortit ses effets à partir de la demande écrite du travailleur et cesse 2 mois après le début de l’exercice par le travailleur de la forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres ou 2 mois après le refus de la demande par l’employeur.
Lorsqu’aucune forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres n’est entamée, la protection prend fin 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.
Cette protection couvre aussi la période du report éventuel.
Si, au cours de la période de protection, l’employeur licencie le travailleur pour des motifs dont il ne sait pas prouver qu’ils sont étrangers à l’exercice du droit prévu par la CCT n° 161 (sont également visés dans ce cadre tous préparatifs en vue du licenciement !), il sera redevable au travailleur d’une indemnité égale à minimum 4 mois de rémunération et à maximum 6 mois de rémunération.
Cette indemnité ne peut pas être cumulée avec l’indemnité de protection contre le traitement défavorable (voir supra) et vice versa, ni avec toute autre indemnité qui est due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail (en ce compris une indemnité pour abus de licenciement), à l'exception des indemnités suivantes :

  • indemnité de préavis ;
  • indemnité de non-concurrence ;
  • indemnité d’éviction ;
  • indemnité complémentaire qui est payée en plus des allocations sociales.

 
Entrée en vigueur

Les dispositions relatives au droit du travailleur de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, telles que décrites ci-dessus, sont d’application depuis le 1er octobre 2022.

Source : Convention collective de travail interprofessionnelle n° 161 du 27 septembre 2022 concernant le droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres

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